SOMME • Encore des rapaces victimes de cage-pièges

Publié le 21 avril 2016 par Patrick Thiery

En février 2012 des agents de la brigade de l’Oise de l’ONCFS ont dressé plusieurs PV d’infraction à l’encontre du propriétaire d’un bois sur la commune de Versigny dans l’Oise.

Celui-ci avait en effet capturé plusieurs buses variables dans un cage-piège, utilisé en principe pour la destruction de corvidés. Les agents de l’environnement ont constaté que M. Raoul DE COETNEMPREN DE KERSAINT avait utilisé une buse variable comme appelant pour en capturer d’autres et en avait laissé « crever » trois autres à des fins d’appâts


L’inspection des lieux a mis en évidence un nombre impressionnant de pièges divers (pièges à œuf, cage piège contenant un renard, boîtes à fauve, collets, piège à mâchoire et à palette) et de cadavres d’animaux : 4 buses variables, 2 autres rapaces indéterminées (probablement un busard et un épervier), un mustélidé indéterminé, 2 merles noirs, un chat domestique et un renard vivant très affaibli.

Une surveillance mise en place pendant plusieurs jours a montré que des pièges n’étaient pas relevés, que certains n’étaient pas utilisés conformément à la réglementation alors que d’autres étaient nouvellement amorcés, montrant ainsi le caractère volontaire de ces captures et destruction d’animaux légalement protégés.

Au moment de l’interpellation lors de la relève des pièges, le propriétaire du bois justifiait son comportement en cherchent à minimiser la gravité des faits (comme souvent) :

  • la buse vivante était un animal blessé qu’il avait recueilli et lui servait d’appât,
  • les restes des buses trouvés dans le piège à corvidés étaient ceux d’animaux entrés eux-mêmes puis tués par la buse qui s’y trouvait déjà
  • il soutenait ne pas savoir que la buse est une espèces protégée « car il y en a tellement »
  • il reconnaissant mal connaître la réglementation sur le piégeage

A l’audience du 16 septembre 2015, l’avocat de M. Raoul DE COETNEMPREN DE KERSAINT soulevait la nullité des poursuites devant le Tribunal de Grande Instance de Paris au motif que son client avait déjà fait l’objet d’un rappel à la loi par le Procureur de Senlis en novembre 2012. Sur ce point on peut s’étonner, au regard de la gravité des faits, que le magistrat se soit limité à cette décision très clémente.

Les juges du TGI de Paris ont estimé que l’action publique n’était pas éteinte. Dans ces conditions, la décision du Procureur de Senlis ne faisait pas obstacle au déclenchement de poursuites pénales pour les mêmes faits par le procureur du TGI de Paris, lieu de résidence du prévenus.

Les juges ont considérés que le prévenu était bien coupable de trois délits : enlèvement et capture d’espèce protégée, détention d’espèce protégée et utilisation d’espèce protégée. De plus il a fait l’objet de 2 contravention de 5ème classe concernant le piégeage.

En application de l’article L415-3 du Code de l’Environnement (délit) et des articles R427-16 et R428-8 du Code de l’Environnement, le tribunal a donc condamné M. Raoul DE COETNEMPREN DE KERSAINT à une amende de 2000€ pour les 3 délits et une amende de 500€ pour chacune des contraventions.

Pour consulter le jugement :

PDF - 1.9 Mo

Picardie Nature, la LPO et l’ASPAS s’étaient constitués parties civiles dans cette affaire.
Notre association et la LPO étaient défendues à l’audience par Benoist Busson, avocat de France Nature Environnement.

Notre association faisait valoir le préjudice moral subi au regard des multiples actions engagées pour la connaissance et la protection des rapaces en général et de la buse variable en particulier.

Le tribunal a déclaré recevable nos constitutions de partie civile et a condamné Raoul DE COETNEMPREN DE KERSAINT à nous payer 500€ en réparation du préjudice moral, 100€ en réparation du préjudice écologique et 600€ au titre de l’article 475-1 du code de procédure civil (prise en charge des frais d’avocat). Même condamnation pour la LPO et 500+200€ à l’ASPAS.

Ce n’est pas la première affaire de capture et destruction de rapaces dans des cages-pièges poursuivie par les tribunaux de la région. Trop souvent encore des rapaces descendent dans ces pièges et sont volontairement « oubliés » par des piégeurs pour qu’ils crèvent de faim, ces derniers considérant encore de nos jours, par archaïsme, que les rapaces sont des espèces nuisibles.

Rappelons leur que le législateur a, dès 1972 soit 5 ans avant le décret sur les espèces protégées (1977), considéré que les rapaces jouaient un rôle positif dans l’équilibre de la nature.

Rappelons également que l’Office National de la Chasse et de la Faune Sauvage, instance de référence pour les chasseurs, avait publié un petit livre vert sur la buse variable à l’usage des chasseurs, indiquant très clairement le rôle des rapaces.
Plus récemment en Picardie, devant les pullulations de campagnols qui provoquent des dégâts aux cultures, la F.R.E.D.O.N – Picardie ( un syndicat professionnel agricole que devait connaître le prévenu, de part son statut d’agriculteur) a rappelé le rôle que les rapaces tiennent en tant que prédateurs naturels de micro-mammifères (mulots, campagnols..) nuisibles aux cultures. Cet organisme a rappelé lors d’une réunion en 2015 que les rapaces, en particulier la Buse Variable consomment 4 à 7 campagnols par jour.

Un article paru en 2015 dans l’Action Agricole Picarde publié par le groupe Réussir, leader de la presse agricole en France, insiste sur les mesures alternatives de lutte contre les rongeurs : « les mesures de protection spécifique aux prédateurs comme les rapaces diurnes ou nocturnes (busards, buses, faucons, éperviers, chouettes, hiboux) ».

Lors de vos balades dans la nature si vous observez des rapaces capturés dans ces pièges à corvidés, localisez le site, prenez des photographies et prévenez le plus tôt possible les agents de l’ONCFS.

Brigade de la Somme : 97 rue du Chateau d’Eau - 80100 Abbeville - Tél : 03 22 27 95 37 - sd80@oncfs.gouv.fr 
Brigade de l’Oise : 573 route de Paris - BP37 - 60600 BREUIL LE VERT - Tél : 03 44 78 16 11 - sd60@oncfs.gouv.fr
Brigade de l’Aisne : 9 ruelle Morin - 02000 LAON - Tél : 03 23 23 41 60 - sd02@oncfs.gouv.fr


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